c. automne 2019

Conducteur : infrastructure écologique

Ceci, par voie de présentation du « projet global » écologique que je tente de mener, tant bien que mal, ces quelques dix années durant.

Le mot « infrastructure » est critique, l’expérience que je mène ne conçoit de l’individu que dans le prisme de l’entre-nous, avec l’idée, en plus de cela, d’« extra-personnaliser » les opérations de chacun, vu que, bon gré mal gré, c’est l’altérité de tous dont on dépend et qui nous concerne.

Il va presque sans dire que le mot « écologique» nous pointe notre avenir collectif – ce qui justifie l’emploi du mot « infrastructure » - de l’entre-nous, comme préoccupation principale de l’écologie, non pas les actes de chacun dans sa bulle. A la fois, il faut peut-être noter, vu la tournure chaque fois plus "gestionnaire d'en haut", "flux", "traçabilité" et "puçage" que prend notre société que l'auteur y est tout-à-fait opposé - l'entre-nous c'est vraiment entre nous - et en plus ça marche mieux comme ça.

Le danger de la technicité n’est pas tant qu’elle soit faisable ou non, sinon que, dans le cas de sa faisabilité, elle se substitue au « nous » - au monde du vivant tel qu’il s’imbrique, s’extirpe et s’articule de lui-même. Cette perte d’agencement, par individu et par groupe, est aussi une perte d’existence « fonctionnelle », une perte de motivation engrenée dans ce monde. Le verbe « pouvoir » et son contraire, l’impuissance, décrivent la globalité de cette situation gravissime, lorsqu’elle touche à notre pouvoir décisionnaire sur notre sort. La technique nous donne des leviers, le « nous » nous donne la raison des leviers.

Ce qui est à proposer est une trame organisatrice de nos vies qui nous permette de reconstituer cet engrenage qui fait bien fonctionner la vie ensemble.

Or, la conscience de notre place dans le monde a été flouée par la banalisation de notre utilisation très prodige de l’énergie. Exemple : un être humain de 70 kilos, consommant 60 Watts par heure, se bouge dans un véhicule de 1,200kg (20 fois plus de poids), consommant 10,000 Watts (10kW) par heure (100 fois plus d’énergie). Et puisque le monde s’est adapté, ces derniers temps, plus à la voiture qu’à l’être humain dedans, lorsqu’il sort de son « véhicule », il se trouve dans un cadre « voiture-friendly » qui n’est plus à la mesure de ses capacités inhérentes. La perte de cadence fait aussi son effet – ces mouvements s’opèrent de manière saccadée, intermittente, ponctuant l’allure et les rythmes plus humain-adaptées.

Tout s’absorbe, comme par des éponges grandissantes, par les consommateurs fonctionnels du capitalisme, tel qu’il existe.

Si les gens s’exercent à paraître heureux et performants, dans ce monde de désœuvrement physique et intellectuel, c’est qu’il devient de plus en plus difficile de ne pas se sentir déprécié et inepte, sans l’assistance de machines de tous bords. On continuera de faire mine de conducteur, même éconduit.

Les animaux domestiques peuvent nous donner des idées claires sur ce qui nous attend, puisque nous-mêmes, nous sommes devenus des animaux domestiques par rapport à ces constructions à une échelle qui paraît nous dépasser, tant intellectuellement que physiquement. Ils se focalisent, comme nous, sur le confort, sur l’aisance et sur la sécurité. Nous devenons des mailles dans une société d’émail, consentants.

La démocratie, notre version présente, intrigue aussi, il ne peut pas nous échapper qu’elle est chiffrée à la enième – pourquoi vouloir plutôt mettre sa foi dans les chiffres que les gens ? Une raison potentielle – se défaire d’une responsabilité quelconque dans l’affaire.