mercredi 6 décembre 2023

Implémentation

Pour qu’un circuit court à finalité socio-écologique se matérialise, cela peut aider de penser de manière modulaire, en nommant chaque élément.

Quelles sont les composants qui, réunis, permettent que l’ensemble fonctionne de manière cohérente – qu’il atteint les objectifs qui lui ont été fixés ?

Ici on décrit une infrastructure, une logistique.

Pour une mobilité à empreinte carbone réduite à moins de deux tonnes pro rata par an relâché à l’atmosphère, …

stockage, hébergement, restauration, transformation, atelier vélo, social, échange (marché).

Essentiellement, pour qu’un transport à pied ou à vélo fonctionne, éventuellement avec des ânes, des mules ou des chevaux, il faut une infrastructure de prise en charge, la nuit, dans l’endroit où on se trouve, qui ressemble fortement à celui des auberges de Montaigne, ou des relais de Genghis Khan. En même temps, les acquis de notre époque et les connaissances nouvelles font qu’il y aura, nécessairement, une fusion de savoirs pré- et post-industriels, où les biosciences nous aideront à stabiliser le monde évolutionnaire du vivant dans lequel nous vivons et dont nous, humains, faisons partie.

Mobilité

La mobilité, telle qu’elle est interprétée actuellement, relève essentiellement de l’accès véhiculaire d’une population locale, aux services et centres de population locale et régionale, que ce soit par le covoiturage ou le transport en commun.

Une toute autre vision de la mobilité est nécessaire pour y voir clair dans un avenir à empreinte en énergie fossile très réduite. La production, la transformation et la redistribution de matières à origine locale deviennent le point focal de l’infrastructure, qui n’a plus besoin d’être aussi surdimensionnée que l’existante, construite pour accommoder des camions à conteneur qui nous apportent des denrées à grand rayon. D’autres filières, comme la filière bois locale, bénéficient du marché renaissant pour remplacer les plastiques avec le bois, les liants avec la résine du bois locale, etc.

Cette mobilité humaine locale, via un réseau stable de gîtes de passage fréquentés, est à la fois locale et universelle. Elle permet de calculer des voyages d’un, deux, ou trois jours, donnant accès à des villes comme Toulouse ou Montpellier, par rapport à la Lozère ou l’Aveyron. Dans un monde maillé de circuits courts, à pied et à vélo, des endroits relativement inaccessibles, avec une infrastructure dédiée aux voitures, deviennent relativement plus accessibles. Ici on peut parler de la remise en habitat de plusieurs coteaux abruptes et terrassés, difficilement accessibles en voiture, facilement atteignables à pied.

De cet manière il est possible de redistribuer équitablement dans des lieux de stockage plus fréquents, les commandes locales.

Flux

Les flux de transport étant réduits en rayon et en vitesse, calées aux rythmes hebdomadaires des villes locales, recapturent les ressources actuellement consacrées à l’achat de carburants venant de l’extérieur. Le système par lequel le fisc prélève des impôts sur les carburants pour ensuite subventionner l’économie rurale change en économie où, dans la réduction de ses achats de carburant trouve moyen de réinvestir en main d’œuvre humaine locale qui remplace la voiture privée pour la plupart des besoins en transport local.

Reconnaissance du terrain

Historiquement, les « surveyors » de l’IGN quadrillaient le terrain, notant des « features »,par exemple, pour savoir si un endroit boisé l’était par des conifères, des arbres à feuilles caduques ou un mélange des deux, ils allaient sur place le constater.

Sentiers

La population connaît de moins en moins le détail géographique de la campagne, qui continue de perdre ses accidents de terrain. Actuellement, les sentiers piétons et muletiers qui ont existé sont peu employés en milieu rural, la plupart des transports à distance étant effectués en véhicule motorisé, même en élevage. La chasse est pratiquée de plus en plus moyennant des déplacements en 4x4, des communications par talkie-walkie ou portable.

Faute d’usage, ces sentiers sont souvent bloqués ou obstrués par des propriétaires qui préfèrent qu’ils tombent en désuétude. Le choix de la marche à pied devient plus hasardeux et l’offre plus restreinte. De manière bénévole ou en travaux d’intérêt général, plusieurs personnes sont employées à débroussailler une gamme forcément réduite de ces chemins, d’autres balisent les GRs et autres chemins de randonnée.

En même temps, l’accès de véhicules à deux ou 4 roues continue d’abîmer beaucoup de sentiers non-conçus pour ce genre d’usage.

Prescription

Entretien des haies, murailles, pierres formant la chaussée de ces chemins, aussi bien que de la conduite de l’eau. Ne pas utiliser des machines mais des outils manuels de jardinage (faucille, scies à bois et

d’élagage, sécateur, etc.).

Routes

Sur toute la voirie publique, de domaine national et parfois privé, il serait possible de développer des syndicats de jardinage des bords de route, par section linéaire. Ces syndicats seraient issus de la population localement présente, l’objectif étant d’installer et entretenir des essences fruitières et s’en faire rémunérer. Également, de fournir des services en faveur de l’écologie, augmenter la biodiversité, dépolluer et régénérer les sols du bord de la route, stabiliser la végétation et l’emprise racinaire qui aidera dans le non-affaissement de la route.

Il serait d’utilité et d’intérêt publique de limiter le poids par essieu et la vitesse des véhicules lourds, en interdisant l’accès à une gamme plus extensive de petites routes.

Les routes et chemins voûtées des canopées des grands et moyens arbres servent à donner de l’ombre et de la fraîcheur, maintenant l’humidité relative de l’air et du sol. Il faudrait cesser la politique d’élimination des arbres à 10 à 20 mètres de chaque côté de la route, en partie pour éviter des « sauts » de feu en cas d’incendie. Les routes de cette envergure exposées au soleil et à plein vent, servent de canaux d’évacuation de l’humidité des forêts qui augmentent le dessèchement et, concernant les inondations, qui augmentent la vitesse de ruissellement des eaux.

Il faudrait que la prise en charge de l’infrastructure routière cesse de sur-prioriser la voiture, par rapport aux plusieurs autres fonctionnalités paysager de cette infrastructure. Dans la mesure qu’elle est bien réfléchie, elle crée et augmente l’accidentation du terrain propice à la bio-diversité et à la production vivrière qui en fait également partie. Par exemple les mûres, le cynorhodon (églantier), le noisetier, noyer, chêne, châtaigner, prunier, pommier, cassis, sont des essences qui poussent bien dans des haies et aux bord des chemins.

Coût de l’infrastructure routière

Le camion et le tracteur fléchissent la route. L’entretien de la route est en partie un coup fixe, et en partie dépend de l’utilisation. Les véhicules lourds, surtout qui roulent à vive allure, abîment beaucoup plus la chaussée que les véhicules légers (l’échelle est un logarithme de la vitesse) et multiplient les travaux d’entretien et de renforcement de la route.

Conflit d’intérêt route : biodiversité, hydrologie (gestion de l’eau), incendie

– besoin d’une gestion intégrale écologisée de l’infrastructure du transport

Entretien et construction routière

– les cantonniers sont responsables de l’entretien des bords de route. La responsabilité pour l’entretien des différentes échelles et catégories de route, des petites routes aux routes départementales et nationales relèvent de différentes autorités et de locales plus et moins grandes et centralisées. L’entretien devient de plus en plus mécanisée et centralisée, avec des moissoneuses-faucheuses pour le gros de l’affaire et des équipes de débroussailleurs.

Historiquement, la corvée était un « impôt » en espèces par le travail, la dîme était le dixième en valeur, que ce soit par le travail d’entretien des routes et chemins de la commune ou d’autres tâches de construction et d’entretien de la voie publique.

Les gros œuvres se faisaient par chantier par encore d’autres groupes d’ouvriers et d’ingénieurs spécialisés.

Place au transport doux ?

Sans doute, mais pas sans peine. La surface de la France est riche en matières de construction, assez bien redistribuées sur l’ensemble du territoire. Cela se mentionne parce que c’est dans le transport de matières lourdes à distance que l’on détermine la limite systémique. Pour transporter un tronc d’arbre de 25 mètres de longueur, par exemple, un convoi exceptionnel ? Les hélicos et les drones deviennent des services de transport d’appoint, limitant le recours à de véhicules motorisés. La robotique laisse espérer que des véhicules sans roues capables de négocier des sentiers humains soient en bonne voie.

L’investissement lourde dans des flottes de grands véhicules de fauchage implique des périodes d’investissement assez longs. Pour autant, il faut immédiatement mettre en train des programmes d’investissements en machines douces (humain et faucille) et désinvestir en machines industrielles mal-calibrées et surdimensionnées.

De faire que la première place soit allouée à nous, en tant qu’humains qui marchons, paraît très légitime. Si l’humain polluait plus, en marchant qu’en voiture, ce serait vu autrement. Ce n’est pas le cas. Les calories consommées par km par un être humain, par rapport à une machine motorisée, sont dérisoires, dans l’ordre de cent fois moins. Son impact sur le sol est si peu qu’il lui faut des routes bien moins solides que pour un véhicule motorisé.

Le transport doux est doux dans ce sens aussi – qu’elle coûte moins cher, beaucoup moins cher, en énergie et en matières, qu’un réseau fait pour accommoder les voitures et les camions.

Si l’on considère l’infrastructure routière comme ayant trois tiers, nationale, régionale et locale, le local se révise en chemin muletier, vélo et pédestre, le régional devient muletier, véhicule léger, le national s’entretient pour les véhicules semi-lourds, semi-vites, de tous nos lendemains.

L’argument que ces propositions sont des mesures de l’« écologie punitive » est à côté de la plaque. Les raisons pour adopter de telles stratégies peuvent tout simplement venir d’une pénurie de ressources, de minerais ou de monnaie, pour faire fonctionner une infrastructure intensément énergivore, qui dans cette seule dimension paraît déjà surannée. Elles sont donc d’entre les mesures adaptatives à une telle réalité, qui rend cette réalité plus et non pas moins vivable pour nous, humains. L’écologie est punitive dans le sens qu’elle nous contraint à nous adapter à sa réalité et non l’inverse.

Nous avons beaucoup plus d’intérêt à adapter notre usage du vivant à son bon fonctionnement, plutôt que de suborner le vivant aux exigences d’une science de mécanisation et d’ordre industriel et non pas « naturel » ou « biologique ». Nous continuons de faire d’énormes progrès dans les bio-sciences, dans ces sciences du vivant,de son histoire et avenir.